Code de la commande publique (Plan)
Voir aussi : Offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées
Section 1 : Offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées
Article L. 2152-2 [Définition de l’offre irrégulière]
Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu’elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale.
Article R. 2152-2 [Régularisation des offres irrégulières]
Dans toutes les procédures, l’acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses.
La régularisation des offres irrégulières ne peut avoir pour effet d’en modifier des caractéristiques substantielles.
Source : Legifrance 01/01/20
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L’offre irrégulière est l’une des notions fondamentales en droit de la commande publique. Derrière une définition simple se cache une réalité juridique complexe, façonnée par une abondante jurisprudence. Analyse du régime de l’offre irrégulière.
Définition de l’offre irrégulière
L’article L2152-2 du Code de la commande publique définit l’offre irrégulière comme » Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu’elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale. « .
Cette définition est précisée par la jurisprudence et la doctrine administrative.
Cas d’offre irrégulière
La qualification d’offre irrégulière recouvre de nombreuses hypothèses
Offre incomplète
- L’offre ne comprend pas tous les documents exigés « Est irrégulière au sens de l’article 53 du code des marchés publics, et donc à éliminer, une offre qui, à défaut de contenir toutes les pièces ou renseignements requis par les documents de la consultation, est incomplète. Il appartient au pouvoir adjudicateur de vérifier si les candidats au marché justifient, lors du dépôt de leur offre, qu’ils ont entrepris les démarches suffisantes pour disposer effectivement du matériel nécessaire au commencement de l’exécution du marché, et d’éliminer les offres qui ne remplissent pas cette condition. » (CE, 12 janvier 2011, Département du Doubs, n°343324).
- Absence de mémoire technique
- Caractère irrégulier de l’offre en raison de l’absence du mémoire technique nécessaire au jugement de la valeur technique de l’offre requis par le règlement de la consultation (CE, 4 mars 2011, n° 344197, Région Réunion).
- Fournir le mémoire technique après une demande de compléter le dossier ne suffit pas (CAA LYON, 14 novembre 2019, n° 17LY01062, communauté de communes du Jovinien).
- L’offre technique ne contient pas tous les éléments requis dans le règlement de la consultation. En lieu et place d’une mémoire technique, elle comprend une « note technique » de deux pages, en dehors de la page de garde, qui couvre sommairement les délais de fabrication et décrit brièvement certaines méthodes d’impression. Dans ce contexte, cette note ne répond pas aux exigences détaillées dans le règlement de la consultation. Par conséquent, l’offre de la société ne respecte pas les prescriptions des documents de consultation et doit être considérée comme irrégulière TA Paris, 10 nov. 2022, n°2221446).
- Mémoire technique incomplet = Offre rejetée (CE, 474772). Entreprises : Attention aux omissions dans vos mémoires techniques ! Apprenez des erreurs des autres ! Le 18 octobre 2024, le Conseil d’État en lance un avertissement clair à toutes les entreprises candidates aux marchés publics : un mémoire technique incomplet n’est pas une simple maladresse, c’est une erreur fatale qui conduit au rejet automatique de votre offre. Cette décision pose également le problème potentiel de la distinction entre imprécision et irrégularité dans le contexte des marchés publics.
- Complétude partielle des rubriques du BPU (CE, 12 mars 2014, Commune de Saint-Denis, n°373718).
Non-respect du cahier des charges
Une offre modifiée lors d’une négociation, entraînant une réduction des prestations initiales fixées par le cahier des charges, doit être rejetée comme irrégulière en application des articles L. 2152-1 et L. 2152-2 du code de la commande publique. En l’espèce, un établissement public avait accepté la « contre-proposition » de la société attributaire, offrant une économie en contrepartie d’une diminution de portions alimentaires. Cette irrégularité a lésé la société classée seconde, lui faisant perdre une chance sérieuse d’obtenir le marché. Par conséquent, la cour prescrit une expertise pour évaluer le manque à gagner de cette dernière, à moins d’un accord amiable entre les parties (CAA Marseille, 14 octobre 2024, n° 22MA01469).
L’offre ne respecte pas les spécifications techniques du CCTP (CAA Marseille, 8 oct. 2018, n°17MA01635).
Réutilisation de matériaux alors que le CCTP impose du neuf (CE, 7 fév. 2023, n°461935).
Méconnaissance des règles formelles
L’offre contrevient aux exigences de forme fixées par l’acheteur (CAA Marseille, 26 nov. 2018, n°17MA04698 – Matériel vidéo ne répondant pas aux fonctionnalités requises, notices techniques étaient en anglais au lieu de français, et borne audiovisuelle ne respectait pas les spécifications techniques demandées).
Ex : Absence de signature électronique de l’acte d’engagement (CE 7 novembre 2014, Ministre des finances et des comptes publics, n°383587).
Présentation erronée des options
L’offre ne respecte pas les modalités imposées pour les options (CE, 23 juin 2010, Commune de Châtel, n°336910 – Offre n’ayant pas présenté séparément de la solution de base l’option chiffrée concernant la mise en place d’un comptage par infrarouge à la montée de voyageurs qui était imposée par les dispositions du règlement de la consultation).
Violation des règles applicables
L’offre enfreint les règles sociales ou environnementales (Article L2152-2 du Code de la commande publique).
Offre hors-délai
L’offre est remise après la date limite de réception des plis.
Offre anormalement basse
L’offre est anormalement basse et l’explication des prix n’est pas suffisante (CE, 30 mars 2017, Région Réunion, n°406224).
Erreur de dépôt dématérialisé
L’offre est déposée dans le mauvais espace numérique (« tiroir numérique ») (CE, 1er juin 2023, n°469127).
Absence de pouvoir du signataire
L’offre n’est pas signée par une personne habilitée à engager le candidat (CE, 27 oct. 2011, Département des Bouches-du-Rhône, n°350935 – Une offre dont l’acte d’engagement n’est pas, avant la date limite de remise des offres, signé par une personne dûment mandatée ou habilitée à engager l’entreprise candidate, est irrégulière et doit être éliminée comme telle avant même d’être examinée).
Conséquences de l’irrégularité
En principe, l’offre irrégulière doit être écartée par l’acheteur, qui est tenu de refuser les plis non conformes (CE, 23 juin 2010, Commune de Châtel, n°336910).
Elle peut sous conditions être régularisée.
Tempéraments jurisprudentiels
La jurisprudence est venue assouplir le principe du rejet automatique.
Plusieurs circonstances atténuantes ont été admises par le juge.
Imprécision des documents de consultation
Si les documents sont imprécis, l’irrégularité peut être inopposable au candidat (CE, 29 mai 2013, n°366456).
Exigence manifestement inutile
L’acheteur peut outrepasser une exigence de la consultation dénuée d’utilité (CE, 22 déc. 2008, Ville de Marseille, n°314244 – L’entité adjudicatrice peut s’affranchir des exigences du règlement de la consultation quand la fourniture des éléments demandés ne présente pas d’utilité pour l’appréciation de l’offre, notamment parce que ces informations ont un caractère public).
Erreur matérielle
Certaines erreurs purement matérielles sont régularisables.
Une erreur formelle dans le BPU ne suffit pas à rendre une offre irrégulière si le candidat a bien pris en compte les modifications sur le fond, comme en témoigne le DQE (CE, 16 avril 2018, n° 417235, Société SNT Petroni).
Dysfonctionnement de la plateforme
Une offre hors-délai peut être admise en cas de dysfonctionnement avéré de la plateforme de dépôt empêchant la transmission (CE, 23 sept. 2021, n°449250).