Erreur de tiroir numérique lors du dépôt de l’offre dématérialisée d’une entreprise
Le pouvoir adjudicateur n’a pas l’obligation d’informer un candidat de l’erreur de « tiroir numérique » lors du dépôt de son offre dans le cadre d’une autre consultation. Il ne peut rectifier lui-même cette erreur, sauf en cas de dysfonctionnement de la plateforme de dématérialisation.
CE, 1er juin 2023, Cté Agglo. de Château Thierry, n° 469127
La communauté d’agglomération de la région de Château-Thierry a engagé une procédure adaptée en vue de l’attribution d’un marché à bons de commande n° 2022S13 relatif à la réalisation de travaux de séparation de réseaux unitaires sur l’agglomération castelle.
La société RVM a déposé, par erreur, sa candidature et son offre sur le profil d’acheteur de la communauté d’agglomération dans le « tiroir numérique » dédié à un autre marché, référencé n° 2022S14, dont les dates limites de remise des offres et candidatures étaient identiques.
La communauté d’agglomération n’a pas pris en compte cette candidature et cette offre pour le marché.
La société RVM demande au juge des référés du tribunal administratif d’Amiens d’enjoindre à la communauté d’agglomération de reprendre la procédure à partir du stade de l’ouverture des candidatures et des offres. Le juge des référés fait droit à cette demande en annulant la procédure et en enjoignant à la communauté d’agglomération de reprendre la procédure à partir de ce stade.
La communauté d’agglomération forme alors un pourvoi en cassation contre cette ordonnance, demandant notamment au Conseil d’État d’annuler l’ordonnance du tribunal.
Pour juger que la communauté d’agglomération avait manqué à ses obligations de mise en concurrence le juge des référés s’est fondé sur ce que les dates limites de remise des offres et candidatures étaient identiques, qu’il n’y avait pas d’ambiguïté possible sur le fait que les pièces transmises par la société correspondaient au marché référencé n°2022S13 et que leur rétablissement au titre de la procédure de passation litigieuse ne nécessitait aucune analyse ni aucune contrainte particulière pour le pouvoir adjudicateur. Autrement dit l’acheteur aurait du réintégrer l’offre dans le bon tiroir numérique.
Le Conseil d’État ne va pas suivre ce raisonnement en considérant qu’aucune disposition ni aucun principe n’impose au pouvoir adjudicateur d’informer un candidat que son offre a été déposée dans le cadre d’une autre consultation que celle à laquelle il voulait postuler. Il ne peut rectifier lui-même l’erreur de dépôt commise par le candidat, sauf en cas de dysfonctionnement de la plateforme de l’acheteur public.
Le Conseil d’État estime ainsi que le juge des référés a commis une erreur de droit en considérant que la communauté d’agglomération avait manqué à ses obligations de mise en concurrence en ne prenant pas en compte la candidature et l’offre de la société RVM.
L’ordonnance du juge des référés est annulée.