Demande de précisions – R2161-5, R2161-11, R2161-29, R2171-18

Demande de précisions sur une offre

Demande de précisions

Demande de précisions ou de clarification lors de l’examen des offres

Demande de précision dans le cadre de l’examen des offres (Code de la commande publique)

Dans le processus d’attribution des marchés publics, l’examen des offres constitue une étape cruciale pour garantir leur conformité et leur évaluation équitable. Lorsque certaines parties d’une offre nécessitent un éclaircissement, l’acheteur peut recourir à une demande de précision, encadrée notamment par les articles R. 2161-5 (pour les appels d’offres ouverts) et R. 2161-11 (pour les appels d’offres restreints) du Code de la commande publique.

Distinction entre demande de précision et régularisation

Il est nécessaire de distinguer cette démarche de clarification des procédures de régularisation.

Contrairement aux pratiques antérieures prévues par l’ancien article 59 du Code des marchés publics, il n’est plus possible de demander aux candidats de « compléter » une offre jugée incomplète ou irrégulière. La mise en conformité d’une telle offre relève exclusivement de la régularisation, qui intervient dans des cas spécifiques définis par la réglementation.

Ainsi, seules peuvent être sollicitées des précisions concernant des éléments ambigus ou incohérents , sans que ces derniers ne rendent l’offre irrégulière.

Par exemple :

  • Une description qualitative ou quantitative imparfaitement détaillée d’un processus technique.
  • Une décomposition insuffisante d’un prix global et forfaitaire (DPGF).
  • Des informations floues sur la qualité ou les caractéristiques des matériaux utilisés.

Ces clarifications visent à permettre au pouvoir adjudicateur de mieux comprendre l’offre soumise tout en respectant les principes fondamentaux de transparence et d’égalité de traitement entre les candidats.

Dans quels cas les utilise-t-on ?

Les demandes de précision ou de clarifications sont prévues dans plusieurs procédures et techniques d’achat, encadrées par différents articles du Code de la Commande publique.

Voici un résumé des principales procédures et techniques concernées :

Appels d’offres ouverts (AOO) – Article R2161-5

Dans les appels d’offres ouverts, l’acheteur peut demander aux soumissionnaires de préciser la teneur de leur offre, sans négocier avec eux. Cette demande de précision vise à clarifier des éléments ambigus ou incohérents sans modifier l’offre initiale.

Appels d’offres restreints (AOR) – Article R2161-11

De manière similaire aux appels d’offres ouverts, l’acheteur peut demander des précisions sur les offres soumises dans le cadre des appels d’offres restreints, sans entrer en négociation avec les soumissionnaires.

Dialogue compétitif – Article R2161-29

Dans le cadre du dialogue compétitif, l’acheteur peut demander des précisions, clarifications, perfectionnements ou compléments sur l’offre finale des participants. Ces demandes ne doivent pas modifier les aspects essentiels de l’offre finale, notamment les besoins et exigences indiqués dans les documents de la consultation.

Marchés globaux (acheteurs soumis au Livre IV) – Article R2171-18

Pour les marchés globaux, l’acheteur peut demander des clarifications ou des précisions concernant les offres dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres, et les offres finales dans le cadre des autres procédures. Ces précisions ne doivent pas modifier les éléments fondamentaux de l’offre ou les caractéristiques essentielles du marché.

Marchés subséquents – Article R2162-9

Lorsqu’un accord-cadre est conclu avec un seul opérateur économique, le pouvoir adjudicateur peut demander par écrit au titulaire de compléter son offre avant la conclusion des marchés subséquents. Ces demandes de précisions visent à clarifier des éléments de l’offre sans modifier les conditions fondamentales de l’accord-cadre ou des marchés subséquents.

Il en résulte que les demandes de précision sont prévues dans les procédures d’appels d’offres ouverts et restreints, le dialogue compétitif, les marchés globaux, et les marchés subséquents, conformément aux articles R2161-5, R2161-11, R2161-29, et R2171-18 du Code de la Commande publique. Ces demandes visent à clarifier des éléments ambigus ou incohérents dans les offres sans modifier leur teneur initiale.

Conditions encadrant les demandes de précision

Les demandes de précision doivent respecter plusieurs règles strictes :

  1. Pas de négociation avec les candidats
    Cette démarche ne doit pas se transformer en négociation indirecte, permettant au soumissionnaire de modifier son offre initiale. Le principe d’intangibilité des offres demeure primordial. Les candidats ne peuvent donc apporter que des explications supplémentaires, non des modifications substantielles.
  2. Égalité de traitement
    Si plusieurs offres présentent des imprécisions similaires, toutes les entreprises concernées doivent recevoir une demande de précision. Cela garantit que toutes les parties jouissent des mêmes opportunités d’explication (CJUE, 29 mars 2012, SAG ELV Slovensko , affaire C-599/10).
  3. Limitation aux erreurs matérielles
    Seules les erreurs manifestement involontaires peuvent faire l’objet d’une demande de précision. Par exemple, une erreur typographique ou un calcul incorrect pouvant être facilement identifié comme tel ne peut pas être corrigé si elle pourrait prêter à interprétation abusive (CE, 21 septembre 2011, Département des Hauts-de-Seine , n° 349149).
  4. Respect des critères d’évaluation
    Les précisions demandées doivent être directement liées aux critères d’évaluation définis dans le règlement de consultation. Elles ne doivent pas introduire de nouveaux aspects ni influencer de manière disproportionnée la comparaison entre les offres.

Exemples concrets de demandes de précision

Voici quelques situations où une demande de précision peut être justifiée :

  1. Clarification d’un processus technique
    Un candidat propose une solution innovante mais fournit une description partielle ou ambiguë de sa méthode de mise en œuvre. Le pouvoir adjudicateur peut demander des détails supplémentaires pour évaluer la faisabilité et la pertinence de cette solution.
  2. Décomposition d’une DPGF
    Dans le cadre d’un marché comportant un prix global et forfaitaire, un candidat omet de préciser certains postes de coûts. Une demande de précision peut être formulée pour obtenir une répartition complète des montants.
  3. Qualité des matériaux
    Si un candidat mentionne l’utilisation de matériaux particuliers sans fournir de détails techniques suffisants (normes, certifications), le pouvoir adjudicateur peut solliciter des informations complémentaires pour vérifier leur adéquation avec les exigences du marché.

Risques et limites associés

Bien que les demandes de précision soient utiles pour éclaircir certaines zones grises, elles doivent être maniées avec prudence pour éviter toute remise en cause de la légalité du processus.

Voici quelques risques potentiels :

  1. Manquement au principe d’égalité
    Si un candidat bénéficie d’un avantage injustifié par rapport aux autres en raison d’une demande de précision mal encadrée, cela pourrait donner lieu à un recours devant le juge administratif.
  2. Modification non autorisée
    Toute modification significative de l’offre initiale, même sous couvert de clarification, pourrait être sanctionnée par le Conseil d’État (CE, 16 janvier 2012, Département de l’Essonne , n° 353629).
  3. Ambiguïté persistante
    En cas d’impossibilité pour le candidat de fournir des explications satisfaisantes, l’offre pourrait être rejetée pour défaut de crédibilité.

Il en résulte que la possibilité pour un acheteur public de demander des précisions lors de l’examen des offres est naturellement utile pour assurer une analyse approfondie et objective des propositions reçues. Toutefois, cette faculté doit être exercée avec rigueur, conformément aux principes fondamentaux régissant les marchés publics : transparence, égalité de traitement et intangibilité des offres.

Jurisprudence

CAA Lyon, 16 janvier 2025, n° 23LY03563 (Modification de la DPGF ? Appréciation de l’irrégularité des offres dans les marchés publics de travaux. La modification des quantités fixées dans la DPGF, l’absence de chiffrage d’une prestation même éventuelle, et le non-respect des spécifications techniques du CCTP constituent des irrégularités justifiant le rejet des offres. Distinction entre les demandes de précisions sur les matériaux et la procédure de régularisation des offres irrégulières. Cette dernière reste une faculté pour l’acheteur et que son absence de mise en œuvre ne constitue pas une rupture d’égalité entre les candidats).