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La réforme des CCAG : Vers des marchés publics plus équilibrés
Introduction
Les cahiers des clauses administratives générales (CCAG) sont des documents types fixant les stipulations de nature administrative applicables à une catégorie de marchés publics. Bien que leur utilisation soit facultative, ils sont très utilisés par les acheteurs publics et ont donc un impact significatif sur la vie des entreprises participant à la commande publique.
Après plus de dix ans sans réforme, les cinq CCAG (Travaux, Fournitures courantes et services, Prestations intellectuelles, Marchés industriels, Techniques de l’information et de la communication) ont fait l’objet d’une révision en profondeur.
Les objectifs principaux étaient de les actualiser au regard des évolutions réglementaires et jurisprudentielles, de rééquilibrer les relations contractuelles, de les moderniser et de tirer les enseignements de la crise sanitaire. Cette réforme est le fruit d’un travail de concertation de 18 mois avec l’ensemble des parties prenantes.
Les principaux axes de la réforme
Un nouveau CCAG dédié à la maîtrise d’œuvre
Face à la spécificité des marchés de maîtrise d’œuvre et aux demandes des acteurs de la construction, un sixième CCAG leur est consacré. Inspiré du CCAG-PI, il prévoit les adaptations indispensables à la bonne exécution de ces marchés (articles L.2431-1 et suivants du code de la commande publique).
Une actualisation et une harmonisation des CCAG
La terminologie a été actualisée pour tenir compte des changements issus de la transposition des directives européennes de 2014 et de l’entrée en vigueur du code de la commande publique.
Elle a aussi été adaptée aux spécificités des marchés de travaux et de maîtrise d’œuvre.
Par ailleurs, les clauses ayant le même objet dans différents CCAG font désormais l’objet d’une rédaction harmonisée.
Des améliorations en matière d’exécution financière
Un système d’options est introduit pour la fixation du montant de l’avance, avec un taux majoré pour les PME.
Le montant des pénalités de retard est plafonné à 10% du montant du marché. Les clauses incitatives relatives à la réalisation anticipée des prestations sont clarifiées et harmonisées.
Les prestations supplémentaires ou modificatives doivent désormais être valorisées via un dispositif de prix provisoires (article L.2194-3 du code de la commande publique pour les marchés de travaux).
Une clause de propriété intellectuelle unifiée et clarifiée
A l’exception du CCAG-MOE qui prévoit une clause spécifique, tous les CCAG comportent désormais une clause de propriété intellectuelle unique sécurisante pour les deux parties.
Elle prévoit un régime de cession à titre non exclusif permettant à l’acheteur d’utiliser les prestations pour ses besoins, tout en permettant au titulaire de les réutiliser.
Une adaptation à la dématérialisation et au RGPD
Les modalités de notification électronique des décisions et les obligations en matière de facturation électronique sont précisées. Les clauses relatives à la protection des données personnelles sont mises à jour pour tenir compte du RGPD.
Une prise en compte du développement durable
Des clauses environnementales sont introduites en matière de transport, d’emballage et de gestion des déchets. Une clause d’insertion sociale activable par l’acheteur est prévue.
Des améliorations pour le règlement des différends
Les modes alternatifs de règlement des différends sont encouragés.
Certaines notions (mémoire en réclamation, différend) sont clarifiées pour sécuriser les recours.
Un délai de recours contentieux de 2 mois est instauré pour les réclamations liées au solde (hors CCAG Travaux et MOE). Le contradictoire est renforcé pour limiter les litiges.
Des clauses pour anticiper les circonstances imprévisibles
Des clauses prévoient les modalités de suspension en cas d’impossibilité temporaire d’exécution liée à des circonstances imprévisibles, ainsi qu’une clause de réexamen lorsque ces circonstances affectent significativement les conditions d’exécution sans faire obstacle à la poursuite des prestations.
Des adaptations propres à certains CCAG
CCAG Travaux
Les adaptations visent à améliorer l’exécution financière, formaliser la coopération entre maître d’ouvrage et maître d’œuvre, mieux encadrer la préparation et l’exécution des travaux et prendre en compte certaines évolutions jurisprudentielles et réglementaires.
CCAG MOE
S’inspirant du CCAG-PI, il s’en détache sur le fond avec des clauses conçues pour s’adapter aux prestations de maîtrise d’œuvre et aux spécificités des opérations de travaux, en veillant à une bonne articulation avec le CCAG Travaux.
CCAG TIC
Plusieurs innovations renforcent la sécurité informatique, adaptent la clause de propriété intellectuelle aux logiciels, définissent mieux certains concepts et précisent la liste des documents du marché.
Conclusion
Cette réforme d’ampleur des CCAG traduit la volonté des pouvoirs publics de faire de la commande publique un levier au service de politiques publiques stratégiques (soutien aux PME, développement durable, innovation) tout en sécurisant les relations contractuelles.
Fruit d’une large concertation, elle devrait permettre de rendre les marchés publics plus équilibrés et vertueux.
Les nouveaux CCAG, entrés en vigueur au 1er avril 2021, sont amenés à devenir rapidement la référence pour les acheteurs publics et leurs cocontractants.
Sources juridiques
- Code de la commande publique : articles L.2112-2, L.2194-3, L.2431-1 et suivants, R.2112-2, R.2191-3, R.2191-7, R.2391-1
- Décret n° 2021-357 du 30 mars 2021 portant modification des cahiers des clauses administratives générales des marchés publics
Notice : le décret, d’une part, fixe à 10 % du montant prévisionnel du marché la part minimale que le titulaire d’un marché global, qui n’est pas lui-même une petite ou moyenne entreprise (PME) ou un artisan, s’engage à confier, directement ou indirectement, à une PME ou à un artisan et, d’autre part, abroge les dispositions relatives à la procédure de passation des marchés de services juridiques de représentation en justice par un avocat et de consultation juridique qui se rapportent à un contentieux. Il a également pour objet de mettre en cohérence les hypothèses de dispense de jury pour l’attribution des marchés globaux avec les hypothèses de dispense de concours pour l’attribution des marchés de maîtrise d’œuvre. Il précise enfin le point de départ du délai de paiement du solde des marchés publics de maîtrise d’œuvre pour tenir compte du mécanisme de décompte général et définitif prévu par le nouveau cahier des clauses administratives générales applicables à ces marchés.
Références : le décret est pris pour l’application des articles 131 et 140 de loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique.